Maman vient me chercher

"Une main tendue en silence console davantage que tous les mots connus"

Il y a de ça environ deux mois, Madame Verveine me raconte un rêve :

- Vous savez c’est étrange, j’ai fait plusieurs fois le même rêve… Maman vient me chercher. Je suis une petite fille, elle me tient la main et m’emmène au jardin… Nous allons voir les roses de papa...

Ma gorge se serre. Je ne m’attendais pas à ça. Je garde mon espèce de sourire figé. L’image me glace "maman vient me chercher…". Je ne veux pas comprendre ce que j’y entends. Je ne dis rien. J’attends la suite même si je me doute qu’il n’y a pas de suite.

Elle poursuit calmement et sereinement :

- J’en ai parlé la dernière fois à une aide-soignante, en lui disant que c’est peut être un signe ! Et elle m’a gentiment dit que "Oui pourquoi pas..."

Elle n’a pas l’air perturbée, bien au contraire, et moi je réalise que l’image que j’ai eu est bien celle dont elle parle. Comme l’annonce d’une fin... "maman vient me chercher"...

Bien sur que Madame Verveine mourra ! Mais comme je m’attache à ne jamais y penser, je suis d’un coup confrontée à la réalité. Sans que je le veuille, ni ne m’en aperçoive, ce sont mes yeux qui vont laisser rouler deux grosses larmes sur mes joues.

Madame Verveine s’empresse de me consoler doucement et sagement :

- Ne soyez pas triste Marmotte ! C’est normal tout ça, c'est dans l’ordre des choses. Mon tour viendra c’est ainsi et puis, vous savez, j’ai eu une belle vie hein… Alors ne pleurez pas.

Je ne sais plus quoi dire. Je suis bouleversée. Elle a raison, je le sais bien, mais j’ai tout de même de la peine à l’imaginer partie et je suis tout autant bouleversée par son air serein. Après coup, je me suis dis que, peut être, elle a envie de partir ; Peut être qu’elle en a marre de regarder ce petit bâtiment gris et que malgré les visites de son fils, de sa belle fille, de son petit fils, de sa sœur, de sa nièce et bien, malgré tout, elle en a assez…

Maman n’est pas encore venue la chercher et chaque fois que je revois madame Verveine, j’y pense et je l’embrasse tendrement comme si c’était la dernière fois…